samedi 15 septembre 1990

 

La France lance l'opération Daguet.
La riposte au pillage de son ambassade et de l'enlèvement de ses diplomates ne s'est pas fait attendre. La France lance l'opération Daguet. C'est le plus grand déploiement de troupes françaises depuis la guerre d'Algérie. Cette opération est placée sous le commandement du général "4 étoiles" Roquejoffre, qui aura sous ses ordres, le général de brigade Jean-Charles Mouscardès qui commandera les forces terrestres, et le général Jean-Pierre Gellibert qui commandera les forces aériennes. L'état-major s'installera à Riyad et restera sous contrôle français. Cette opération prévoit l'envoi en Arabie Saoudite, dans les prochains jours, d'une brigade aéroterrestre composée de 4.000 hommes, 1.000 véhicules, dont 210 blindés, 48 hélicoptères de combat et 30 avions de combat, d'une compagnie du génie et une section de missiles anti-aériens Mistral. Le dispositif français dans le Golfe passe ainsi de 9.000 à 13.000 hommes. La réponse à la violation de l'ambassade comporte également 3 autres points : l'expulsion immédiate d'une trentaine de ressortissants irakiens, dont des diplomates et des militaires stagiaires, une demande au Conseil de sécurité d'étendre au trafic aérien l'embargo contre l'Irak et, enfin, de lourdes sanctions contre toute entreprise française qui contreviendrait à cet embargo. Après l'annonce par la France du déclenchement de l'opération Daguet, Saddam Hussein se dit surpris de la position de François Mitterrand, l'accusant de nourrir une "attitude hostile" contre l'Irak.

Selon Greenpeace, les navires occidentaux transportent des bombes atomiques.
Les navires de guerre américains, britanniques et français à capacité nucléaire participant aux opérations au Moyen-Orient transportent quelque 450 armes atomiques de divers types, affirme l’organisation écolo-pacifiste Greenpeace, dans un communiqué publié à Washington. Elle précise que chacun des 3 porte-avions américains (Saratoga, Independence et Kennedy) navigant dans la région, transportent chacun 100 bombes ou charges nucléaires anti-submersibles. Le cuirassé Wisconsin et les divers croiseurs et destroyers de l’US Navy disposent au total d’une cinquantaine de missiles de croisière Tomahawk à capacité nucléaire. Greenpeace rappelle que les groupes de bataille accompagnant les porte-avions américains sont généralement protégés par 2 sous-marins d’attaque, emportant, selon les classes, de 2 à 5 missiles Tomahawk. 8 à 18 bombes nucléaires et missiles air-sol à moyenne portée sont à bord du porte-avions français Clemenceau. 2 à 4 charges nucléaires sont à bord du destroyer Gloucester et de la frégate Battleaxe de la marine britannique. A tous ces engins s’ajoutent les armements nucléaires du destroyer soviétique Oudaloy qui, selon l’annuaire naval Jane’s, emporte 8 torpilles de 533 mm à capacité nucléaire et peut lancer des missiles SS-N-14 équipés d’une ogive atomique.

L'exode des Koweïtiens.
Des milliers de Koweïtiens fuient leur émirat pour l'Arabie Saoudite, submergeant les services locaux de l'immigration. Les forces irakiennes viennent en effet d'ouvrir la frontière entre l'émirat et l'Arabie, près de Khafji. Les candidats au départ se sont vus confisquer de leurs passeports, leur argent et les biens qu'ils transportaient par les Irakiens. Il ne s'agit pas d'un signe d'ouverture dans la crise du Golfe : la frontière reste totalement fermée aux Occidentaux...

Interview de Georges Marchais sur TF1 : l'échec de la logique de guerre.
Interrogé sur les propos que vient de tenir Mitterrand sur la crise du Golfe, le secrétaire général du PCF exprime d’emblée sa condamnation la plus ferme du "nouvel acte de banditisme" perpétré par Saddam Hussein, jugeant "justes les mesures de caractère politique et diplomatique" envisagées par le gouvernement. Ainsi, ajoute-t-il, "il est normal que le Conseil de sécurité soit saisi, il est normal que des mesures soient prises à l’égard de l’ambassade d’Irak à Paris, il est normal que soient consultés les alliés de la France". "Par contre, fait observer Georges Marchais après avoir rappelé que le PCF ne se détermine ni en fonction de Bush ou de Gorbatchev, mais en fonction des intérêts de la France, force est de constater que François Mitterrand continue d’inscrire l’ensemble de sa politique dans la logique de guerre dont il s’est réclamé à plusieurs reprises. Ce n’est pas la bonne voie", explique le secrétaire général du PCF qui fait ce "constat que les mesures prises de ce point de vue depuis un mois n’ont apporté aucune solution". Rappelant qu’avant même ce qui s’est passé à l’ambassade de France au Koweit, la Grande-Bretagne, l’Italie et l’Allemagne ont pris la décision de renforcer leurs forces militaires dans la région, Georges Marchais souligne : "nous sommes dans une situation où il est possible que s’engage un conflit dont personne ne peut prévoir à quel point il peut être catastrophique. Je pense aux populations de cette région, je pense aussi aux soldats". Par conséquent, le PCF "continue de demander au président de la République et au gouvernement de faire tout ce qu’ils peuvent pour essayer de trouver une issue politique à cette situation. C’est difficile mais cela implique des discussions et des négociations, en particulier le fait d’essayer d’obtenir des pays arabes qu’ils puissent jouer un rôle actif en vue d’aller vers une solution politique dans le cadre de l’ONU", ajoute Georges Marchais.

L'Allemagne met la main à la poche.
Avec le Japon, l'Allemagne était la cible des critiques américaines pour son manque de contribution à l'Opération Bouclier du Désert. La RFA vient donc de débloquer 3,3 milliards de marks (1,7 milliards d'€) dont une moitié est affectée à l'effort de guerre américain et l'autre aux pays touchés par l'embargo. Le chancelier Helmut Kohl ne veut plus que les Allemands soient accusés de "se mettre à couvert quand le temps se gâte sur la planète"...

En bref :
   

La télévision irakienne diffuse une cassette enregistrée spécialement par George Bush. Le président américain lance un appel à la paix et prévient que "l'Irak n'a aucun moyen de gagner".

Saddam Hussein ordonne la libération dès aujourd’hui de tous les ressortissants français malades ou âgés. Le président irakien répond ainsi à un appel de l’ancien chef d’Etat algérien Ahmed Ben Bella.

Ali Hassan al-Majid, ministre irakien de l’Administration locale, est nommé gouverneur de la capitale du Koweït. Il cumulera son nouveau poste avec sa fonction ministérielle.

Le ministère français de l’Economie et des Finances supprime le contrôle sur les prix des produits pétroliers. L’encadrement décidé lors du début de la crise du Golfe n’a fait que justifier officiellement le fait que les prix directeurs soient décidés sur le marché ultra-spéculatif de Rotterdam par les groupes de négoce des compagnies elles-même. On s'attend donc à une forte hausse du prix de l'essence dans les prochains jours...

Ils ont dit :
   

François Mitterrand, président de la France : "J'ai toujours dit que je retenais l'hypothèse de nouvelles agressions irakiennes et qu'il conviendrait d'y répondre."
Général Michael Dugan,chef d’état-major de l’US Air Force : "La puissance aérienne est la seule solution pour nous (...). Il s’agirait d’un bombardement de Bagdad centre-ville". Selon lui, cette analyse de la situation est partagée par l’ensemble de l’état-major américain dans le Golfe. Il escompte que ses escadres persuaderont tôt ou tard à coups de bombes les Irakiens que "Saddam et son régime ne peuvent pas les protéger" (Quotidien américain Washington Post).
 James Baker,secrétaire d'Etat américain : La RFA va accorder une aide "très significative" aux USA pour soutenir le déploiement des forces américaines.

 

 

Chronologie des événements - septembre 1990

Alors que l'ONU tente des médiations à Bagdad, l'Irak libère plusieurs centaines d'otages.
Partout dans le monde, l'opposition à Saddam Hussein grandit. L'URSS soutient les Américains et manoeuvre pour la paix.

USA et URSS s'unissent contre l'Irak. Les pays du Golfe mettent la main à la poche, la France lance l'opération Busiris aux Emirats Arabes Unis et le Sénégal se joint à la coalition internationale.
Pour contrer la coalition, l'Irak se trouve un allié : l'Iran.
A Koweït-City, l'armée irakienne pille les ambassades de France, du Canada, des Pays-Bas et de Belgique.En réponse, la France lance l'opération Daguet et le Canada envoie des avions de guerre en Arabie Saoudite...

Au Koweït, les ambassades ferment les unes après les autres. Les Koweïtiens franchissent par milliers la frontière koweïto-saoudienne réouverte.
Venus d'Egypte, d'Italie ou d'Argentine, les soldats débarquent par centaines en Arabie Saoudite.

Les hommes de Daguet partent pour le Golfe devant des dizaines de journalistes. De son côté, le Clem atteint les eaux saoudiennes.
Devant les Nations Unies, Mitterrand prêche la paix. L'Irak est satisfait, pas les Etats-Unis... Après maintes tergiversations, l'URSS renonce finalement à envoyer des troupes dans le Golfe.
Désormais, le baril de pétrole s'échange à 41 $ à la bourse de Tokyo. Un record !

 

Galerie de photos
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En vidéo


La réponse de la France au saccage de son ambassade (24 minutes)
FR3 - Journal de 19h30 - 15 septembre 1990


La crise du Golfe (33 minutes)
TVE - Télévision espagnole (extrait en espagnol) - 15 septembre 1990