jeudi 30 août 1990

Interview d'un Koweïtien à l'AFP : terrible situation au Koweït.
Koweit-City, capitale de l’émirat envahi le 2 août par les armées de Saddam Hussein, est une ville paralysée, en grève générale permanente où chaque nuit de jeunes résistants font le coup de feu contre les soldats irakiens, selon un réfugié koweitien arrivé récemment en Arabie Saoudite. "La situation est terrible, raconte-t-il à l’Agence France-Presse. Koweit-City est une ville morte où stationnent à chaque coin de rue les véhicules blindés de l’armée irakienne. Plus rien ne fonctionne excepté l’eau, l’électricité, les pompiers et quelques services médicaux. (...) Dans les quelques supermarchés encore ouverts, il ne reste que du pain et des conserves. Tout le reste a disparu. Tous les magasins ont été pillés. Tous les bureaux sont vides. Personne ne travaille", ajoute le réfugié. "La nuit, la ville est placée sous couvre- feu de 19 h à 7h. On entend des détonations". Selon lui, ce sont de jeunes résistants. Mais il estime que "la résistance est mal organisée. Les groupes se forment par quartier et n’ont pas de liaison entre eux". Pour lui "une chose est sûre, les ennemis ont déjà perdu des hommes et lorsque la nuit tombe, les soldats irakiens ont peur".

George Bush partage la facture du Golfe.
Sans attendre l’accord du Congrès, George Bush vend pour 2,2 milliards de dollars d’armes à Riyad. Le président américain voit grand : il demande aux Occidentaux de participer au financement de de sa concentration militaire dans le Golfe. Pour cela, Bush envoie en tournée mondiale son secrétaire d'Etat au Trésor Nicholas Brady. Bush demande ainsi à ses alliés européens une aide pour supporter le coût de l'opération Bouclier du Désert, évaluée à environ 23 milliards de dollars. Le Japon a répondu en offrant 1 milliard de dollars. Selon l’agence britannique Reuters, "dans les milieux diplomatiques occidentaux en poste à Tokyo", on estime que cette "aide" est "plutôt maigre"...

Le Yemen dément toute aide accordée à l'Irak.
Selon l’agence WAM des Emirats, Abdel Aziz Dali, ministre d’Etat yéménite aux Affaires étrangères, dément fermement que des avions de guerre irakiens stationnent dans des aéroports de son pays. Tom King, secrétaire britannique à la Défense, a cru pouvoir lancer mercredi une telle information. Le chef de la diplomatie yéménite dénonce les "tentatives visant à porter atteinte à l’image du Yémen en vue de l’impliquer dans la crise du Golfe". Il dément aussi qu’un pont aérien entre le Yémen et l’Irak serait organisé pour contourner l’embargo économique de l'ONU contre Bagdad. Rappelant les "efforts du Yémen visant à aider les frères arabes à sortir de la crise" du Golfe, Abdel Aziz Dali explique l’absence de son pays à la réunion du Conseil de la Ligue Arabe, qui doit s’ouvrir au Caire, par son refus de participer à des rencontres arabes avant "l’assainissement des relations inter-arabes". "Nous avions souhaité le report de cette réunion en vue d’engager de nouvelles consultations pour améliorer le climat entre pays frères", ajoute-t-il.

Discours de Margaret Thatcher : défendre militairement les intérêts de l'Europe.
"L’Europe aura besoin de volonté et de forces militaires pour défendre ses intérêts dans le reste du monde, conjointement avec les Etats-Unis", déclare Margaret Thatcher, devant la conférence de l’Union démocratique européenne (UDE) réunie à Helsinki. Selon le Premier ministre britannique : "Les aspects extérieurs joueront un rôle important dans l’élaboration de nouvelles mesures pour la sécurité en Europe" ce qui implique "le maintien en Europe des troupes américaines et canadiennes, ainsi que des armes nucléaires".

La France restreint les déplacements des Irakiens sur son territoire.
Depuis les 27 et 28 août, indique le ministère français de l’Intérieur, les déplacements de 26 Irakiens, des militaires ou des personnes "ayant à connaître des secrets de défense nationale", sont limités à la commune où ils résident. Par ailleurs, selon des sources policières, une trentaine d’Irakiens "soupçonnés de vouloir manipuler la communauté mulsulmane de France" ont été placés sous surveillance. Des sources diplomatiques indiquent que les pays de la CEE sont parvenus à un "accord de principe" pour limiter les déplacements des diplomates irakiens dans la Communauté.

Interview de Saddam Hussein sur les télévisions américaines.
Le président irakien reçoit le pasteur américain Jesse Jackson, arrivé hier pour une visite de plusieurs jours en Irak. Saddam Hussein, indique l’agence irakienne INA, évoque au cours de cet entretien les "derniers développements dans la région". Le président irakien souhaite qu’une solution au conflit soit trouvée "entre Arabes". Il s’est prononcé à plusieurs reprises en faveur d’un règlement pacifique. Jesse Jackson, qui interviewe le président irakien pour plusieurs chaînes de télévision américaines, a été reçu auparavant par le ministre des Affaires étrangères, Tarek Aziz. Celui-ci a souligné la "nécessité d’une option pacifique pour résoudre la crise du Golfe".

En bref :
   

A ce jour, plus de 250 navires de tous pavillons ont été interceptés dans le Golfe, par l'US Navy. Par ailleurs, l’ambassade des USA à Bonn annonce que les USA vont renforcer leur dispositif militaire en Arabie avec des unités blindées et des hélicoptères d’assaut basés en RFA . Des unités de la 12e Brigade aérienne et de la 3ème division blindée se joindront à l’opération Bouclier du Désert.

Plusieurs associations d’anciens combattants de Grande-Bretagne, des USA, du Canada et de France adressent le télégramme suivant à leurs gouvernements : "Nous appelons nos gouvernements respectifs à soutenir le secrétaire général des Nations-Unies dans ses efforts pour négocier une solution pacifique à la présente crise au Moyen-Orient."

La Corée du Nord condamne l’invasion et l’annexion du Koweit par l’Irak mais dénonce les USA pour la concentration de forces armées dans le Golfe, annonce jeudi l’agence KCNA.

Abassi Madani, président du Front Islamique du Salut algérien (FIS) rencontre Saddam Hussein à Bagdad. L’entretien est consacré aux "développements dans la région du Golfe" et aux "dangers de la présence américaine sur le sol arabe". Madani était dimanche dernier à Riyad dans le cadre d’une mission de "bons offices".

Le Foreign Office britannique annonce que 32 ressortissants britanniques ont été interpellés à leur domicile du Koweït et transférés à Bagdad.

Tarek Aziz, ministre irakien des Affaires étrangères, annonce qu'un recours au terrorisme n'est pas exclu en cas de conflit armé. De son côté, le chef de l’armée de l’air irakienne déclare que Bagdad enverrait son aviation et des missiles contre Israël et l’Arabie Saoudite en cas d’attaque de son pays par les forces occidentales rassemblées dans le Golfe.

Ils ont dit :
 
Lu dans la presse :

Ambassadeur d'Arabie Saoudite en France : " La France a favorablement répondu aussitôt que le roi Fahd a fait part d’une demande d’assistance militaire. Au début, nous n’avons rien réclamé. Nous ne l’avons fait qu’à partir du moment où nous avons jugé bon de le réclamer " (Radio française Europe 1).
Saad Al-Abdallah Al-Sabah, ministre koweitien du pétrole en exil : "Si les négociations échouent, il n’y a qu’un choix... la guerre".
Gareth Evans, ministre australien des Affaires étrangères : "Toute atteinte à la sécurité des otages serait un motif suffisant d’intervention militaire".
Jesse Jackson, ancien candidat à la Maison Blanche : "Nous espérons que certaines des réponses (du président irakien) contribueront à éclairer les gens de par le monde, à donner plus d’espoir et à éviter une éventuelle guerre désastreuse. Nous espérons ne pas connaître une situation où le prix du pétrole monte et le prix du sang baisse".

 

Quotidien français Libération : "L’attitude actuelle de la France qui pourrait passer pour pusillanime, risque de lui faire perdre de très précieuses positions diplomatiques et commerciales dans le Golfe, à l’heure où la disparition de l’exceptionnel client irakien pèsera terriblement lourd sur les bilans des entreprises d’armement (...). A l’heure précisément où les Américains engrangent les contrats de fournitures à l’Arabie saoudite..."

Sondage :

Sondage SOFRES - Le Figaro : 53% des Français se déclarent favorables à la participation de la France à une éventuelle opération militaire dans le Golfe, contre 41% qui s’y opposent. 47% souhaitent que la présence française dans le Golfe soit renforcée mais 50% croient toujours à une solution diplomatique du conflit.

Chronologie des événements - août 1990

L'Irak menace l'Arabie Saoudite. La communauté internationale réagit : l'ONU condamne l'invasion et les Américains déclenchent l'opération Bouclier du désert. L'Irak répond en prenant plusieurs milliers d'Occidentaux en otages.

L'ONU décrète un embargo contre l'Irak alors que la coalition anti-irakienne se construit. Alors que les USA renforcent leurs troupes dans le Golfe, la Ligue Arabe s'oppose à l'Irak.

En Irak et au Koweït occupé, les otages deviennent boucliers humains, provoquant l'inquiétude du monde entier. De son côté, l'armée irakienne assiège les ambassades occidentales au Koweït. L'ONU renforce donc l'embargo et autorise le recours à la force pour le faire respecter.

Le Koweït devient une province de l'Irak. Des personnalités occidentales se rendent à Bagdad. L'ONU et l'URSS tentent des médiations. En signe de bienveillance, l'Irak libère quelques otages.

 

septembre 1990

Gallerie de photos
  • image 1
  • image 2
  • image 3
  • image 4
  • image 5
  • image 6
  • image 7
  • image 8
En vidéo


Les otages seront libérés sous certaines conditions (25 minutes)
FR3 - Journal de 19h30 - 30 août 1990


La crise du Golfe (14 minutes)
ARD - Télévision allemande (extrait en allemand) - 30 août 1990


La crise du Golfe (5 minutes)
CNN - Télévision américaine (extrait en anglais) - 30 août 1990