Antenne 2 annonce que l'Irak se retire du Koweït...
Reprenant une dépêche de l'Agence France-Presse, la chaîne de télévision Antenne 2 (aujourd'hui France 2) annonce à 11h40 GMT que l'Irak accepte "sans condition" le retrait du Koweït, le correspondant de la chaîne à Washington en informe même la Maison Blanche. Fière d'annoncer avant CNN la fin de la guerre du Golfe, la chaîne française est bientôt suivie par la chaîne britannique BBC qui reprend cette information, provoquant l'interruption des débats à la Chambre des Communes, une hausse de 20 points à la Bourse de Londres, de 1,43% à celle de Paris et une baisse du prix du pétrole. La télévision israélienne interrompt ses programmes, les Saoudiens sont soulagés. A Bagdad, le correspondant du quotidien espagnol El Mundo constate une euphorie dans les rues : les youyous se mêlent aux concerts de klaxons. Mais "lorsque Migdad Murad (présentateur de Radio-Bagdad) commence à égrener la longue liste des conditions, la joie s'est évanouie peu à peu". De nombreuses personnes pensent que l'Irak craint une utilisation par les USA de bombes à neutrons (petites bombes nucléaires), ou de bombes FAE (Fuel Air Explosive), plus communément appelées bombes "à effet de souffle". Ces bombes ont la particularité de provoquer un nuage brûlant tout l'oxygène sur plusieurs centaines de m², ne laissant ainsi aucune chance à tous les êtres vivants se trouvant sur place. Ce qui expliquerait entre autres cette proposition irakienne qui surprend l'Occident...
... sous certaines conditions.
Dans un communiqué destiné aux autorités de Moscou, le Conseil de commandement de la révolution irakien envisage un retrait du Koweït "afin d'achever un règlement politique réalisable et acceptable", mais il assortit cette concession de plusieurs conditions. Pour entamer l'application de la résolution 660 du Conseil de sécurité, l'Irak réclame :
* un cessez-le-feu immédiat,
* l'annulation de toutes les résolutions votées contre elle après la résolution 660 lui ordonnant d'évacuer le Koweït,
* la fin de toute forme de boycott ou d'embargo,
* l'évacuation des forces coalisées de la région du Golfe, dans un délai de un mois,
* le retrait des armements livrés à Israël sous prétexte de crise du Golfe,
* l'évacuation par Israël des Territoires occupés en Palestine, dans le Golan syrien et dans le Sud-Liban ; en cas de refus, les Nations Unies devraient appliquer à Israël des mesures identiques à celles qu'elles ont prises contre l'Irak à la suite de l'invasion du Koweït.
* la "solution démocratique" prônée au Koweït devrait écarter du pouvoir la dynastie al-Sabah,
* la prise en charge par les pays coalisés de la reconstruction de l'Irak, ravagé par la guerre,
* l'annulation des dettes dues aux pays agresseurs, notamment à ceux du Golfe,
* une autre répartition des ressources entre pays arabes riches et pauvres,
* la libération de la région du Golfe de la présence militaire étrangère.
Le communiqué s'achève ainsi : "Notre garantie fondamentale, après Dieu, demeure notre grand peuple irakien et nos courageuses forces armées. La victoire contre les oppresseurs est certaine dans les jours à venir, comme elle était certaine dans le passé avec la permission de Dieu."
Le président de l'URSS Mikhaïl Gorbatchev informe l'Italie, la France et les USA que l'Irak serait disposé à discuter d'un retrait du Koweït.
Conséquences de cette annonce sur les places financières.
Peu après l'annonce du plan de paix soviéto-irakien, l'euphorie s'empare de toutes les places boursières. La Bourse de Londres atteint son niveau le plus haut depuis le début de la crise du Golfe. A Madrid, les échanges sont interrompus de longues minutes pour tenter de calmer cette euphorie exceptionelle. Mais après l'annonce par les Irakiens d'un certain nombre de conditions à ce retrait et le rejet des USA, le soufflé retombe. Alors que la Bourse de Paris atteignait 3% de hausse à l'annonce du plan irakien, elle clôt sur une simple hausse de 1%. Et New York ne s'ouvre que sur une petite hausse de 0,8%... Pour les investisseurs du monde entier, la fin de la guerre et de ses conséquences économiques n'est pas pour tout de suite...
Les autorités israéliennes considèrent que l'annonce irakienne d'un éventuel retrait traduit "le premier signe d'un vrai fléchissement de Saddam".
Marlin Fitzwater, porte-parole de la Maison Blanche : "Nous voulons toujours jeter un coup d'oeil sur tout ça, mais la guerre continue. Il n'y a aucun changement sur la base de ce que nous savons en ce moment".
Le gouvernement soviétique fait part de son "espoir" et de sa "satisfaction" après la proposition irakienne.
Le président français François Mitterrand déclare, lui, que cette proposition de Bagdad, qualifiée de "diplomatie de propagande", "ne peut être retenue".
Pour le Premier ministre britannique John Major, la proposition de Bagdad "ne changera rien aux plans militaires de la coalition (...), l'offre irakienne est une feinte, voire une tromperie".
Le gouvernement italien suggère aux Alliés de "réorienter" les bombardements sur l'Irak.
George Bush fait savoir, après les conditions imposées par l'Irak, qu'il rejette totalement la "farce cruelle" de Bagdad. Le Président américain demande une application complète des résolutions de l'ONU et précise qu'il n'est pas question d'établir un lien avec aucun autre problème de la région. Bush conclut en appelant "le peuple et les soldats irakiens à contraindre Saddam Hussein à se retirer." En fait, ces propositions irakiennes risquent fort de précipiter l'offensive terrestre, que Washington craint de ne pouvoir déclencher au cas où, dans les prochains jours, Saddam Hussein se laisserait aller à annoncer de nouvelles concessions.
Les autorités espagnoles réclament l'arrêt des hostilités dans le Golfe.
Israël refuse de réceptionner des masques à gaz pour les Palestiniens.
Les autorités israéliennes refusent les 25.000 masques à gaz qu'offrait le Danemark pour les Palestiniens des Territoires occupés. Tel-Aviv affirme que les modèles de ces masques sont trop anciens et ne correspondent pas aux normes que s'est fixé l'Etat Hébreu. C'est donc par l'intermédiaire de l'ONU que les Danois feront parvenir leurs masques aux Palestiniens, qui dénoncent la lenteur avec laquelle les autorités israéliennes mettent en oeuvre la distribution des masques à gaz en Cisjordanie et dans la bande de Gaza.
Manifestations contre la guerre en Jordanie.
En Jordanie, la foule manifeste contre la guerre dans les rues d'Amman. Alors que l'imam de la mosquée de la capitale appelle à la modération, la foule souhaite se rendre devant l'ambassade des Etats-Unis à Amman, mais elle en est empêchée par les forces de l'ordre. La proposition de Saddam Hussein de se retirer du Koweït sous certaines conditions est très favorablement accueillie par les Jordaniens.
Interview de l'ambassadeur d'Irak en France sur TF1.
L’ambassadeur d’Irak à Paris (qui doit quitter lundi la capitale française à la suite de la rupture des relations diplomatiques par Bagdad) commente sur la télévision française TF1 la déclaration du Conseil de la révolution irakien. "L’Irak est désireux, a dit El Hachemi, d’une solution honorable de tous les problèmes du Moyen-Orient". Evoquant "les sacrifices" consentis par les Irakiens, il a ajouté : "j’espère que les Alliés réalisent que la poursuite de la destruction de l’Irak, du massacre des civils, des femmes et des enfants innocents, non seulement ne résoudra pas, mais encore compliquera l’affaire. Plus la guerre durera, plus élevé sera le prix de la paix. Si les Etats Unis refusent l’ouverture de la paix, ils porteront la responsabilité de tout désastre qui se produira dans la région".
Après une tournée des capitales arabes, le Premier ministre espagnol, Felipe Gonzales, déclare que son gouvernement soutient toujours et totalement les Alliés engagés dans le Golfe.
Aux USA ont lieu, au cimetière militaire d'Arlington, les premières obsèques de soldats américains tués dans la guerre du Golfe.
Assuré de la neutralité bienveillante de la Jordanie, du Yémen, du Soudan et de la Mauritanie, l'Irak reçoit le soutien de la Corée du Nord et surtout de Cuba. Field Castro soutient l'Irak qui a, selon lui, remporté "une victoire morale" en tenant bon face aux Alliés.
L'aviation française effectue 2 nouvelles missions de reconnaissance en territoire irakien. Les Jaguar réalisent également 2 raids au-dessus du Koweït. Même si les bombardements se poursuivent, l'offensive terrestre semble aussi se préparer côté français : un premier lot de canons automoteurs français 155 GCT est livré au gouvernement koweïtien en exil à Taëf.
La compagnie Air France, à l'image de ses concurrentes, annonce un plan d'économie de 610 millions de francs (100 millions d'€). La baisse de fréquentation de ses lignes a motivé cette mesure d'austérité. Une chute causée essentiellement par la peur du terrorisme.
L'Administration américaine évalue le coût de la guerre pour les 90 premiers jours de 1991 à 260 milliards de francs (40 milliards d'€) dont 210 milliards (32 milliards d'€) seront payés par les autres alliés.
Epuisés et terrorisés par les bombardements répétitifs, la population irakienne commence à se rebeller. A Diwanlyed, à 150 km de Bagdad, la foule tue 10 dirigeants du parti Baas.
Pour protester contre la guerre du Golfe et la participation financière de leur pays à celle-ci, 2 Japonais ont lancé depuis la tribune des visiteurs leurs chaussures sur les députés réunit en session habituelle au Parlement, provoquant leur expulsion immédiate de l'Assemblée et l'interruption des débats.
Londres signale à la Croix-Rouge Internationale que 2 lieutenants-colonels irakiens étaient détenus comme prisonniers de guerre sur le sol britannique. Ils n'avaient pas été difficiles à capturer : ils faisaient un stage auprès de l'armée de Sa Majesté.
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